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La crise énergétique que nous traversons actuellement a mis en lumière le fort impact de la baisse d’activité des centrales nucléaires sur les niveaux de prix de l’électricité observés en France. Un éclairage sur cette technologie située au cœur du système électrique français s’impose !

Commençons par quelques chiffres

6 grammes équivalent CO2 par kilowattheure (kWh) comme facteur d’émissions pour la production d’électricité d’une centrale nucléaire. À titre de comparaison, l’éolien en mer1 émet 23 grammes équivalent CO2 par kWh, une centrale à gaz2 513 grammes équivalent CO2 par kWh et une centrale à charbon3  1 095 grammes équivalent CO2 par kWh (source : UNECE, ADEME).

32,6 térawattheures (TWh) d’électricité ont été produits par la centrale de Gravelines en 2020 (6 réacteurs de 900 MW chacun, situés dans la région Hauts-de-France). Cette centrale permet de couvrir les besoins de plus de 7 millions de foyers français, soit l’équivalent de la consommation annuelle des départements du Nord et du Pas?de?Calais. C’est la seconde centrale la plus puissante d'Europe, après la centrale nucléaire de Zaporijia, en Ukraine.

75% des Français sont aujourd’hui favorables au nucléaire alors qu’ils n’étaient que 47% en 2018 (source : Académie des Sciences, SFEN).

69% : c’est la part du nucléaire dans la production totale d’électricité en France en 2021 qui s’élève à 522,9 TWh. La production nucléaire est repartie à la hausse en 2021 (+8% par rapport à 2020 mais 5% en deçà des niveaux de 2019) malgré une faible disponibilité du parc de réacteurs en fin d’année 2021.

Une question de fission…

L’uranium
Dans la nature, l’uranium se trouve à 99,3% sous forme d’uranium 238 et à 0,7% d’uranium 235.

Dans les réacteurs nucléaires actuels, seul l’uranium 235 est utilisable à une concentration d’environ 3% – 5%. L’uranium naturel doit donc être enrichi pour augmenter la part d’uranium 235 dans le combustible.

La fission
Au démarrage d’un réacteur nucléaire, des neutrons sont envoyés sur le combustible. Un atome d’uranium 235 absorbe un neutron, ce qui le déstabilise et provoque sa fission. L’atome d’uranium 235 se fragmente et libère ainsi :

  1. deux atomes plus légers,
  2. deux à trois nouveaux neutrons,
  3. et de l’énergie, bien sûr ! 
     

Si les neutrons libérés sont absorbés par d’autres atomes d’uranium 235, ils provoqueront les mêmes effets, produisant une réaction en chaîne qui se poursuivra naturellement dans le réacteur.

Lorsqu’ils sont libérés, les nouveaux neutrons ont une vitesse trop élevée pour être capturés par d’autres atomes d’uranium 235 : ils doivent être ralentis à l’aide d’un modérateur
Dans la majorité des réacteurs commerciaux actuels, c’est de l’eau pure (on parle d’eau légère) sous pression qui est utilisée comme modérateur.
On parle donc de réacteur à eau pressurisée (PWR pour Pressurized Water Reactor). Un modèle a été développé en Europe : le European Pressurized Reactor, ou EPR.

Un réacteur nucléaire peut fonctionner pendant 4 à 5 ans, avant de devoir être rechargé.

Pour arrêter ou ralentir la réaction de fission, il faut capturer des neutrons pour les empêcher de provoquer de nouvelles réactions. Pour ce faire, on introduit dans le réacteur des « barres de contrôle », fabriquées dans un matériau capable de capturer un grand nombre de neutrons sans pour autant fissionner ou devenir radioactifs. 

L’uranium utilisé dans les centrales françaises est entièrement importé pour être enrichi en France. Quatre pays fournissent plus de 70% des importations : le Kazakhstan, l’Australie, le Niger et l’Ouzbékistan.

Il faut de l’eau pour produire de l’électricité 

L’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) propose une illustration claire du fonctionnement d’un réacteur.

Le circuit primaire (en jaune sur l’image de l’IRSN)

Dans un réacteur à eau pressurisée, l’eau dans laquelle baigne le combustible fait office de modérateur et est chauffée par l’énergie produite par les réactions de fission à environ 330°C.

Cette eau est mise en mouvement au sein d’un circuit fermé, le circuit primaire.

Les conduites du circuit primaire passent dans une enceinte appelée générateur de vapeur, qui contient de l’eau. La chaleur de l’eau du circuit primaire est transférée à l’eau liquide présente dans le générateur de vapeur, qui se vaporise.

L’eau du circuit primaire retourne refroidir le combustible nucléaire avant de reprendre son cycle dans le circuit primaire.

Le circuit secondaire (en bleu)

Le circuit secondaire est le second circuit fermé d’un réacteur à eau pressurisée. 

La vapeur produite dans le générateur de vapeur entraîne une turbine, reliée à un alternateur : c’est ainsi qu’est produite l’électricité. En France, selon le modèle, un réacteur a une puissance de 900 MW, 1 300 MW, 1 450 MW, voire 1 650 MW pour l’EPR en construction à Flamanville.

Cette vapeur est refroidie dans le condensateur, au contact des conduites du circuit de refroidissement, avant de retourner dans le générateur de vapeur.

Le circuit de refroidissement (en vert)

Dernier circuit de cette course, le circuit de refroidissement, qui n’est pas un circuit fermé.

L’eau du circuit de refroidissement permet de refroidir la vapeur du circuit secondaire dans le condenseur.

Dans les centrales avec des tours aéroréfrigérantes, l’eau du circuit de refroidissement est à son tour refroidie au contact de l’air ambiant dans la tour. Une partie de cette eau s’échappe de la tour et est remplacée par de l’eau captée dans une masse d’eau externe (océan, mer, fleuve ou bassins artificiels).

Dans les autres centrales, l’eau du circuit de refroidissement est captée dans une masse d’eau externe puis rejetée dans cette masse d’eau à une température légèrement supérieure. 

Des déchets qui font débat…

Les déchets nucléaires sont issus de la réaction de fission décrite plus haut. Ils ont pour origine :

  • d’une part, les atomes légers produits par la fission de l’uranium 235, qui subissent un enchaînement de réactions au sein du réacteur. On parle de « produits de fission » ;
  • d’autre part, des atomes qui ont capturé un ou plusieurs neutrons, sans pour autant avoir fissionné.
     

Ils constituent un sujet sensible dans le débat public. Hautement radioactifs pour certains d’entre eux, faiblement radioactifs pour d’autres, ces déchets sont tous toxiques et présentent un risque pour la santé mais aussi pour les sols, les nappes phréatiques, l’air, les cours d’eau ou la mer en cas de fuite. Ceux qui posent le plus de problèmes sont les déchets de haute activité et à vie longue, qui représentent actuellement 4 200 m3 au total en France.

  • La haute activité désigne le fait qu’un grand nombre de réactions de désintégration s’y déroulent : des atomes instables libèrent de l’énergie pour revenir à un état stable. L’énergie libérée par ces réactions est suffisamment importante pour causer de graves dommages à l’environnement et aux êtres vivants (par exemple, des mutations dans l’ADN).
  • La vie longue désigne le fait que les atomes provoquant ces réactions de fission sont si nombreux qu’il faudra un temps extrêmement long avant qu’ils n’aient tous fissionnés, rendant le déchet inoffensif.
     


Les grands réacteurs à eau pressurisée se sont largement imposés dans le monde ces dernières décennies (ils représentent actuellement 97% des 427 réacteurs recensés par l’Agence internationale de l'énergie atomique), et appartiennent majoritairement à ce que l’on appelle la « génération II » de réacteurs, voire à la génération dite « III / III+ » pour les plus récents (par exemple l’EPR). 

Mais l’industrie nucléaire est aussi une industrie innovante, et de nouveaux types de réacteurs commencent à apparaître à travers le monde. Certains sont plus petits que les réacteurs actuels : on parle de Small Modular Reactors (SMR, avec une puissance de moins de 300 MW). D’autres, les réacteurs de « génération IV », ont des principes de fonctionnement différents de ceux décrits plus haut : pas de modérateur, utilisation d’un gaz pour le refroidissement, voire même recours à un combustible nucléaire dissout dans du sel fondu. 

On le voit, l’éventail de technologie est large pour contribuer à la décarbonation du mix énergétique mondial !

David Balussou et Frédéric Jehl

Notes

1  Eolien offshore avec fondations en béton

2  Cycle combiné gaz naturel sans capture, séquestration et stockage du carbone

3  Charbon pulvérisé sans capture, séquestration et stockage du carbone

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